ISF : Trois stratégies pour réduire le montant en toute légalité | L'expertise immobilière | Scoop.it
Avec un patrimoine supérieur à 1,3 million d’euros, près de 300 000 Français sont redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Il est possible d’en réduire le montant en toute légalité. Une enquête "Money" pour Enjeux Les Echos, Mai 2014.

 

En France, deux symboles vert et blanc sont associés au « joli mois de mai » : pour tous, le muguet et, pour quelques centaines de milliers de contribuables, la feuille de déclaration de l’ISF ! Rechercher des solutions afin de réduire cette facture est une tentation compréhensible. Mais en matière fiscale, personne n’est logé à la même enseigne.


«  Pour beaucoup de dirigeants ou d’actionnaires d’entreprises familiales, le taux de 1,5% est confiscatoire par rapport au rendement actuel des actifs, après impôt sur le revenu et prélèvements sociaux », juge ainsi Jean-François Desbuquois, avocat associé de Fidal. De même pour les détenteurs de grands patrimoines immobiliers ou fonciers. A chacun de jouer sur les trois grands leviers que distingue Christophe Chaillet, directeur de l’ingénierie patrimoniale chez HSBC France : réduire le patrimoine imposable, faire jouer le plafonnement ou investir dans une entreprise.

 

1. Restreindre le périmètre du patrimoine imposable

 

Il s’agit de rendre non imposable un actif taxable et de jouer sur les décotes. Parmi les solutions les plus évidentes, la résidence principale – dont 30% de la valeur est exonérée – est en première ligne, suivie par l’acquisition d’œuvres d’art et d’antiquités en salle de ventes. Un contribuable déclarant par exemple 1 350 000 euros de patrimoine, soit à peine au-dessus du seuil, doit normalement acquitter 2 225 euros. En achetant pour 50 000 euros ou un peu plus d’œuvres d’art, il retombe sous ce seuil et n’est plus assujetti à l’ISF. Au final, cet investissement lui « rapporte » donc 2 225 euros par an, soit 4,45% de « rendement » (hors assurances). Pas mal ! Autre option, investir dans les forêts, gage d’une forte décote. Murielle Gamet, notaire associée chez Cheuvreux Notaires, observe un regain d’intérêt pour ce type d’actif (voir pages suivantes), tout comme Francis Brune, directeur juridique et fiscal de LCL Banque Privée : « L’investissement dans l’un de nos neuf groupements forestiers est une solution d’optimisation de l’ISF », vante-t-il.

 

La donation est également très prisée, en particulier celle aux enfants majeurs (dans le cas d’un foyer fiscal indépendant) comme coup de pouce à leur démarrage dans la vie. Attention cependant à ne pas stipuler une réserve d’usufruit au risque, sinon, de rendre l’opération sans incidence sur l’ISF. Autre possibilité, mais un peu plus complexe, que suggère Murielle Gamet : « Effectuer une donation temporaire d’usufruit à un tiers, à une association ou à une fondation, d’un bien immobilier loué, c’est-à-dire céder les revenus locatifs, ce qui permet de sortir le bien de son patrimoine. » Cette astuce n’est pas contestée par l’administration si l’opération a une justification économique et non purement fiscale. A savoir que le bénéficiaire (par exemple l’ascendant pour l’aider à régler sa maison de retraite, un enfant pour qu’il supporte ses frais d’étudiant…) en retire un revenu nécessaire et ne soit pas rattaché au foyer fiscal du donateur. A noter également : un dirigeant qui prend sa retraite peut conserver l’usufruit de ses titres et céder la nue-propriété à un descendant. Dans ce cas, il ne paiera l’ISF que sur la valeur fiscale de l’usufruit, à condition que le nu-propriétaire exerce une fonction de manager dans l’entreprise.

 

Deux stratagèmes

 

Quant aux assurances-vie, elles n’échappent pas à l’ISF, même en cas de clause interdisant le rachat pendant quelques années. Il y a quelque temps, des assureurs avaient imaginé une astuce pour exclure un contrat d’un patrimoine : prévoir une clause d’indisponibilité de dix ans, permise par l’article R.142-8 du code des assurances. Selon eux, cette clause permettait d’effacer la créance sur l’assureur au regard de l’ISF, puisque l’assurance-vie devenait provisoirement « non rachetable ». Toutefois, une circulaire du 4 janvier 2010 de la Direction générale des impôts a contesté cette analyse, ce qu’a confirmé une décision récente du Conseil d’Etat (n° 349202 du 3 décembre 2012). La question reste en suspens et c’est à la Cour de cassation de trancher. Pour l’avenir, le doute est levé par l’article 11 de la Loi de finances rectificative pour 2013 : « La créance que le souscripteur détient sur l’assureur au titre de contrats qui ne comportent pas de possibilité de rachat pendant une période fixée par ces contrats, doit être ajoutée au patrimoine du souscripteur. » Si la clause d’indisponibilité ne peut être invoquée, deux autres stratagèmes semblent encore envisageables pour minorer l’ISF via une assurance-vie : les bonus de fidélité et les clauses de participation différée, que proposent certains assureurs. Selon Christophe Chaillet, directeur de l’ingénierie patrimoniale chez HSBC France, ces techniques « ne semblent pas concernées par la nouvelle règle ». Francis Brune, directeur juridique de LCL Banque privée, conseille tout de même de consulter son avocat.

 

Quant aux assurances-vie dites de retraite collective (« Madelin » pour les chefs d’entreprises, « article 83 » pour les cadres salariés), la valeur acquise par l’épargne n’est pas à déclarer, puisqu’on ne peut en sortir autrement qu’en rente au moment de la cessation d’activité professionnelle. De même pour les plans d’épargne retraite populaire (PERP). Enfin, les assurances-vie dites « tontinières » – uni­quement proposées par la compa­gnie Le Conservateur – n’ont pas à être déclarées, excepté après les 70 ans du souscripteur. C’est là une judicieuse opportunité, à condition d’accepter le blocage des fonds jusqu’à l’échéance, habituellement de vingt-cinq ans. Il est toutefois possible d’entrer en cours de route, par exemple dix ans avant l’échéance, ce qui revient au même qu’une clause d’indisponibilité temporaire. La performance financière est de bon niveau. A noter aussi que les contrats de capitalisation offrent un atout majeur – l’exonération des plus-values. Mais, contrairement à l’assurance-vie, il n’existe pas d’exonération des droits de succession.

 

2. Jouer sur le plafonnement des impôts à 75% du revenu

 

L’idée, cette fois, est de réduire le montant de ses revenus, afin de faire jouer les mécanismes de plafonnement de l’impôt. Le Conseil constitutionnel impose en effet que le total de l’ISF et de l’impôt sur le revenu ne dépasse pas 75% des revenus d’un contribuable. Attention, utiliser ce mécanisme ne présente un intérêt que pour les fortunes importantes, de l’ordre de la dizaine de millions d’euros au moins. L’optimisation consiste alors à miser sur les enveloppes de capitali­sation : Sicav de capitalisation, assurance-vie, plan d’épargne en actions (PEA). On peut aussi gérer ses actifs à travers des sociétés civiles immobilières (SCI), avec option pour l’impôt sur les sociétés. Si le plafonnement est difficile à actionner pour un cadre ou un chef d’entreprise aux revenus élevés, il peut en revanche se révéler très efficace lorsque le dirigeant a cédé son affaire et vit de retraits sur une assurance-vie ou sur un plan d’épargne en actions de plus de huit ans. Soulignons que la valorisation du capital placé en assurance-vie n’a pas à être intégrée dans les revenus pris en compte pour le plafonnement de l’impôt. La loi votée en ce sens à la fin de l’année dernière a en effet été annulée par le Conseil constitutionnel. C’est seulement en cas de retraits que la fraction des profits – qui reste toutefois marginale, donc peu taxée – entre dans les revenus imposables.


3. Investir dans des PME et des entreprises innovantes

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